Pétition Sauver le grec au lycée Millet (Cherbourg)
Nous relayons ici la pétition de nos collègues du secondaire de Cherbourg, où le grec, au lycée J.F. Millet, est menacé à la rentrée prochaine.
Texte de la pétition :
Professeurs de lettres classiques au lycée J.F. Millet de Cherbourg, nous avons appris avec consternation que le rectorat de Caen envisageait la suppression de l'enseignement du grec à la rentrée prochaine.
Le jour de l’annonce par notre ministre de l’Éducation Nationale des mesures prises en faveur de la laïcité (création de « mille ambassadeurs de la laïcité ») disparaît dans notre lycée l’apprentissage de la langue et de la culture de ceux qui ont inventé la démocratie …
La culture générale n’est pas une matière de lycée ; chaque matière apporte sa pierre à l'édifice mais qui touche au latin et au grec en détruit les fondations : c'est rompre avec notre histoire, c'est renier notre héritage littéraire, artistique, philosophique, politique, scientifique.
Chaque année, malgré l'appellation de « langue morte » ou de « langue ancienne » tout aussi peu porteuse, des élèves continuent d'exprimer le souhait de découvrir cette langue, cette culture. Certes, pour la première fois, seule une élève de première suit cette année 1h30 de grec sur les 3h imposées par les programmes. Mais nous avons 14 élèves en seconde et 13 élèves en terminale, et ces chiffres sont loin d’être ridicules. Le grec, depuis trente ans, a toujours été enseigné pour quelques élèves. Cette langue n’est plus, depuis longtemps, réservée à une élite mais proposée à tout élève, quel que soit son niveau, qui est curieux et conscient que cette matière lui demandera rigueur et travail mais l'aidera à mieux maîtriser sa langue et à enrichir sa culture et sa réflexion. La valeur d’une option ne se mesurerait-elle qu'au nombre d’élèves inscrits ?
Le lycée Millet a mis en place cette année un projet autour de la « dynamisation de la filière littéraire ». La suppression de l'option LCA grec est un non-sens à cet égard. Nous ne comprenons pas que d'un côté on émette le souhait de valoriser, et que de l'autre, on détruise ce qui a été patiemment édifié.
Après les événements terribles que notre pays a vécus en ce début d’année et les nombreuses interrogations autour des notions de laïcité, de blasphème, d’athéisme (autant de termes grecs...), ces mots de Jacqueline de Romilly, grande helléniste française, première femme professeur au Collège de France, prononcés lors d’une interview en 2007 accordée au magazine Le Point, prennent une résonance toute particulière :
« Apprendre à penser, à réfléchir, à être précis, à peser les termes de son discours, à échanger les concepts, à écouter l'autre, c'est être capable de dialoguer, c'est le seul moyen d'endiguer la violence effrayante qui monte autour de nous. La parole est le rempart contre la bestialité. Quand on ne sait pas, quand on ne peut pas s'exprimer, quand on ne manie que de vagues approximations, comme beaucoup de jeunes de nos jours, quand la parole n'est pas suffisante pour être entendue, pas assez élaborée parce que la pensée est confuse et embrouillée, il ne reste que les poings, les coups, la violence fruste, stupide, aveugle. Et c'est ce qui menace d'engloutir notre idéal occidental et humaniste. »
Les langues anciennes, nous en sommes convaincus, ont un rôle essentiel à jouer dans cette lutte contre l'obscurantisme que nous devons tous mener.
Les professeurs de lettres classiques du lycée Millet et des collèges du secteur
Si vous approuvez notre démarche et désirez nous apporter votre soutien en vue d'empêcher la fermeture du grec au lycée Millet, merci d'ajouter votre signature à cette pétition et de la faire connaître autour de vous.
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