Un recours contre quatre articles de la loi LRU

Source : Dépêche AEF n°132518 (27 mai 2010)

Suite à des recours déposés par des professeurs de droit contre les comités de sélection et les modifications du statut des enseignants chercheurs, on apprend que le rapporteur du Conseil d'État, Rémi Keller, vient de proposer le renvoi au Conseil constitutionnel de 4 articles de la loi LRU. Le Conseil d'État devrait faire connaître sa décision de saisir ou non le Conseil constitutionnel dans quelques semaines. S'il est saisi, le Conseil constitutionnel devra statuer dans un délai de trois mois. Sont concernées les dispositions suivantes de la loi LRU :

  1. l'article sur les comités de sélection car le dispositif pose « de sérieuses questions relatives aux principes généraux du droit des concours – principes qui découlent pour la plupart du principe d'égalité - car le CA1, n'a pas accès à leur dossier et peut ne comporter aucun spécialiste de la discipline du poste à pourvoir ». Les collègues juristes à l'origine du recours contestent le dispositif de nomination des membres des comités de sélection par le CA, sur proposition du président et après avis du CS, au nom du principe constitutionnel d'indépendance des professeurs, institué par la décision du Conseil constitutionnel du 20 janvier 1984. Ils invoquent les motifs d'inconstitutionnalité suivants : le fait que le président de l'établissement peut ne pas être un professeur et le fait que ni le CA ni le CS ne siègent en formation restreinte aux professeurs. Enfin, le rapporteur souligne une « ambiguïté » qui existe sur le caractère « consultatif » des comités de sélection : durant les travaux parlementaires, ils ont été présentés comme se substituant aux commissions de spécialistes et donc comme jury de recrutement, mais le 3e alinéa de l'article prévoit que le comité de sélection n'émet qu'un avis, conférant ainsi au CA le rôle de jury.

  2. l'article qui institue le droit de veto du président : les requérants estiment qu'il est contraire au principe d'indépendance des enseignants-chercheurs et non plus seulement des professeurs.

  3. l'article qui stipule que le CA définit « les principes généraux de répartition des obligations de service » : les requérants estiment que cet article va à l'encontre des principes d'égalité. En effet, la fixation des obligations de service des enseignants relève du domaine statutaire (décision du Conseil d'État du 12 juin 1987). Or, « le principe d'égalité des agents d'un même corps suppose qu'ils soient soumis aux mêmes règles statutaires [...] ».

  4. l'article par lequel « les universités peuvent, demander à bénéficier des RCE en matière budgétaire et de gestion des ressources humaines ».

 

par Estelle Debouy (université de Poitiers)



1 Lequel, en tant que jury de recrutement, ne reçoit pas les candidats.