Motion du Comité de l'APLAES sur la réforme des concours et des masters

Le Comité de l'APLAES, réuni le samedi 9 janvier 2010, a voté la motion suivante :

En l’état actuel des choses, les exigences gouvernementales concernant la « réforme » des concours de recrutement et la « réforme » conjointe des masters apparaissent à l’APLAES comme tout à fait inacceptables et, du reste, inapplicables en ce qui concerne les masters.

L’APLAES rappelle sa position constante : le CAPES de Lettres classiques doit comporter trois épreuves écrites (français, latin, grec) à cause de la trivalence des professeurs recrutés et parce qu’il n’y a aucune raison de privilégier l’une des deux langues anciennes aux dépens de l’autre, au choix des candidats ; à l’oral, les deux épreuves envisagées doivent être fondamentalement disciplinaires en même temps que susceptibles d’évaluer la compétence des candidats en didactique de leurs disciplines. Un concours de recrutement de professeurs ne peut faire l’économie de la vérification de leur aptitude scientifique à l’enseignement dans toutes les matières qu’ils auront à enseigner. Aucun universitaire ayant contribué à la formation des candidats et à l’attribution des diplômes ne saurait s’offusquer de l’existence d’un contrôle sérieux exercé sur les candidats dans le cadre des épreuves du concours, bien au contraire. Il est inconséquent de prétendre élever le niveau du recrutement des professeurs tout en diminuant la part des épreuves disciplinaires dans le concours. S’agissant des langues anciennes dans le CAPES de Lettres classiques, l’APLAES ne peut se satisfaire de voir les deux épreuves « lourdes » qui existaient jusque-là fondues désormais en une seule épreuve (latin + grec) qui reproduirait petitement celle qui est proposée aux élèves candidats au baccalauréat. Au CAPES de Lettres modernes, la disparition complète du latin relève de la même incohérence entre prétendue élévation du niveau et affaiblissement des exigences, sans parler de ce qu’elle révèle sur la considération dans laquelle sont tenus les apports culturels, littéraires, intellectuels, de l’antiquité classique.

Construire pour les masters (dans les nombreuses disciplines où il existe un concours de CAPES) des maquettes du type maintenant demandé par les ministères concernés relèverait à proprement parler de la résolution de la quadrature du cercle. Il est objectivement impossible de mettre dans un master, c’est-à-dire dans un nombre d’heures et dans un laps de temps qui restent globalement identiques à ce qu’ils étaient, à la fois ses éléments scientifiques heureusement sauvegardés, plus l’ex-préparation disciplinaire au CAPES, plus des éléments de didactique, plus des stages avec ou sans responsabilité.

Personne n’y parviendra : l’acquisition des savoirs fondamentaux, la participation à des stages, la préparation au concours, l’initiation à la recherche avec la rédaction d’un mémoire, la mobilité internationale, la réorientation en second semestre en cas d’échec au concours, tout cela ne peut se faire en même temps.

L’APLAES pense observer en tout ce qui se passe depuis des mois dans l’improvisation, l’inorganisation et l’obstination, une excellente manière de faire décliner le rayonnement de l’Université française à l’étranger : quels sont les étudiants Erasmus qui persisteront à venir effectuer en France une partie de leur master dans de telles conditions de désorganisation, d’inefficacité, de contradiction et d’absurdité ?

L’APLAES, solidaire en cela de la totalité du monde universitaire, exhorte les ministres à suspendre l’ensemble de ce processus délétère, à abandonner l’idée de faire passer en force des « réformes » qui font l’unanimité contre elles comme l’a montré le vote du CNESER au mois de décembre 2009, et à entamer enfin, en lui accordant la durée nécessaire, la vaste concertation promise mais jamais entreprise, à laquelle l’APLAES, spécialiste en son domaine, est évidemment prête à apporter son concours.